Fragments d’elles s’est achevé avec son septième et dernier tome, répondant à la question qui fait office de fil rouge à la série, à savoir qui est la jeune fille qui a prévenu les secours lors de l’accident du personnage principal, Yusuke Serizawa ? Cet élément permettait de mettre en place un mystère quant à l’identité de la jeune fille, en plus de proposer un prétexte simple au retour dans la mémoire du héros, qui repense à toutes les filles qu’il a fréquenté et qui ont contribué à le faire évoluer. Un concept narratif vraiment intéressant, qui aura été tenu tout le long de la série, proposant un peu de fraicheur dans le genre de la romance, permettant de questionner l’importance de ces histoires d’amour dans la construction de l’identité, mais pas seulement. On revient sur tout ceci sans le moindre spoil, y compris en ce qui concerne la résolution du récit et la fameuse question de l’identité de la jeune femme.
Un grand merci à Pika pour l’envoi du volume.
Mon avis sur les tomes précédents : Tome 1 – Tome 2 – Tome 3 – Tome 4 – Tome 5
En revenant de façon chronologique sur les différentes relations de Yusuke, les autrices permettent surtout de dresser le portrait d’un garçon qui grandit, puisqu’on le suit du collège jusqu’à ce qu’il soit un jeune adulte bien ancré dans le monde du travail. Chaque relation abordée est au final l’occasion de voir des étapes dans la construction et l’évolution du garçon, comment ses erreurs le font évoluer ou non, comment les peines de cœur impactent sa vision des relations et de la vie en général. Et surtout, comment les hasards des rencontres influent sur le chemin que prend sa vie.
C’est là le cœur de la série, qui est toujours parfaitement travaillé, puisque l’évolution du personnage est toujours crédible, tout comme ses relations avec les jeunes femmes qu’il rencontre au fil des chapitres. De plus, le fait que la narration soit à la première personne permet de partager la remise en question de Yusuke, qui prend conscience d’erreurs qu’il a pu commettre, donnant à la série un ton mélancolique, porté par les remords et les regrets du personnage.
En le voyant grandir au fil des ans et des relations, la question de la maturité émotionnelle se pose et invite à l’introspection à ce sujet. C’est surement une des très belles réussites de la série à mes yeux, qui ne cherche à embellir le portrait de personne, Yusuke ayant parfois des comportements déplacés voire plus, de la même façon que ses différentes compagnes n’agissent pas toujours bien. Cela permet de capter une partie de la complexité des relations humaines et amoureuses.
Quant à la conclusion de l’histoire, elle est particulièrement bien sentie et intéressante, jouant sur une forme de trompe l’œil vis-à-vis du questionnement posé en début de récit, pour amener vers quelque chose de plus intéressant et ouvert je trouve. J’avais écrit lors de la parution du premier tome que l’on peut questionner la pertinence de ranger ce manga en « simple » romance, mais je me dis que c’est peut-être une vision justement réductrice de la romance de penser qu’elles ne peuvent pas proposer plus que les histoires d’amour classique.
Cette série le démontre, en étant totalement ancrée dans le genre (puisque c’est quand même les histoires d’amour qui drivent le récit) mais en cherchant à proposer une structure narrative singulière en phase avec ce qu’elle souhaite raconter. C’est de cette belle alchimie entre le fond et la forme que vient tout le sel de la série, qui parvient à raconter comment un individu se construit, évolue et fait sa vie, avec en toile de fond les relations amoureuses, qui sont également un élément important de sa vie (et de la vie de beaucoup, voire la plupart des gens). De ce fait, cette série contribue à rappeler que la romance est un genre très riche, à même de proposer des histoires qui sont de vrais supports de projection pour questionner les rapports humains. Et elle le fait particulièrement bien.