Mon avis sur… Jumbo Max T.1 de Tsutomu Takahashi

Tsutomu Takahashi est un auteur prolifique et passionnant, qui allie un style percutant à une écriture dense et précise, pour nous proposer des récits toujours très sombres et souvent radicaux dans leur approche. Il a ainsi su me convaincre au fil des découvertes de son immense talent, si bien que j’accueille avec grand plaisir l’arrivée de sa nouvelle série, Jumbo Max, actuellement en cours au Japon avec sept tomes parus dans le Big Comic de Shogakukan, éditée par Pika, que je remercie pour l’envoi du volume, avec une traduction de Julien Favereau.

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Vous pouvez lire le premier chapitre en ligne via CE LIEN.

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Mais de quoi est-il question cette fois-ci ? On peut éventuellement le deviner à l’illustration de la jaquette, il est question de médicament, et plus précisément de viagra, élément évoqué par la règle sur le numéro du tome, idée particulièrement amusante de l’auteur, que j’ai envie de surnommer Tsutudur compte tenu du sujet de sa série. En effet, nous suivons Tateo Sone, pharmacien quinquagénaire fraichement marié, souffrant depuis toujours d’une incapacité à avoir un érection. Disposant d’un peu de patrimoine, notamment des appartements qu’il loue, il se retrouve en possession d’un viagra expérimental ultra puissant après avoir débarrasser le logement d’une jeune actrice porno.

Et alors qu’aucun traitement n’a jamais fonctionné jusqu’à présent sur lui, cette pilule fait un miracle et lui donne, à cinquante trois ans, la première érection de sa vie. De quoi lui donner envie de se procurer d’autres comprimés. Il contacte donc son ancienne locataire, et par son entremise, achètera au père de cette dernière d’autres comprimés, avant de s’associer à lui pour percer le mystère de sa composition. Si Tateo souhaite simplement en fabriquer afin d’avoir de quoi bander jusqu’à la fin de ses jours, son associé Sumaoka pense surtout à en faire le commerce. Pour cela, ils vont s’allier à une jeune employée de laboratoire pharmaceutique aussi charmante que volontaire, qui pourra effectuer pour eux les tests afin de déterminer la composition du produit.

Mais le tout va devoir s’accommoder avec la vie familiale de Tateo, mari d’une femme fraichement enceinte (il serait le père de l’enfant, mais lui-même a du mal à croire qu’il a pu avoir une érection) et beau père d’une jeune fille qui lui coûte cher en cours de balai. Un postulat riche, qui peut évoquer lointainement Breaking Bad avec l’idée d’un potentiel trafic qui vient perturber une vie ranger, et propice au développement d’un récit sombre questionnant le rapport à la sexualité et son marchandage.

Ce premier tome, excellent au demeurant, est surtout l’occasion de mettre en place le récit, en développant évidemment le personnage principal Tateo, dont le potentiel discursif est d’ores et déjà très fort compte tenu de son problème érectile et le fait qu’il s’apprête à baigner dans un trafic illégal pour le résoudre (car je ne l’ai pas précisé, mais bien entendu, le médicament en question est vendu sous le manteau, importé de Chine). La jeune associée du personnage a également une caractérisation particulièrement réussie, femme volontaire et forte en gueule n’ayant pas de souci à baigner dans cette affaire, permettant un potentiel d’évolution intéressant.

Il n’y a en réalité à ce stade pas beaucoup plus à en dire, car comme je l’ai précisé, on est surtout dans l’installation du récit. Mais c’est vraiment la promesse de celui-ci, et le fait qu’il nous vienne de Tsutomu Takahashi, un mangaka talentueux et très sérieux dans le traitement de ses récits et des personnages, qui m’enthousiasme particulièrement. Un récit qui parle d’un trafic quelconque est toujours bon à prendre, mais si en plus on y greffe la question taboue, passionnante et fertile (sans mauvais jeu de mots) de l’impuissance masculine, on a tous les ingrédients pour une intrigue riche et profonde. J’étais convaincu avant même d’avoir  le tome en mains, je le suis d’autant plus maintenant qu’il a été lu.