Mon avis sur… adabana T.1 de Non

adabana

Vous m’excuserez de commencer par un petit jeu de mots qui a déjà du être fait plus d’une fois avant moi : adabana de Non, c’est un grand « Oui » pour moi ! Kana nous a déniché un thriller en trois tomes seulement, réservé à un public adulte comme l’indique la jaquette, au sujet sensible, qui pourrait donner quelque chose de vraiment passionnant sur la globalité si le tout est traité avec soin. Nous allons voir, sans trop en dire, en quoi ce premier volume a quelque chose de vraiment saisissant.

Pour commencer, resituons la série et son autrice. Adabana est un seinen prépublié dans le Grand Jump en 2020-2021, compilé en trois volumes comme je l’ai déjà précisé. Il s’agit du premier manga de Non publié en France, mais l’autrice avait déjà écrit et dessiné au Japon Delivery Cinderella de 2010 à 2012, ainsi que Hare Kon, en cours depuis 2016 avec 20 volumes à son actif. Trois séries résolument adultes, aux thématiques qui le sont tout autant (le sexe, la polygamie, la prostitution, le meurtre…). Concernant adabana, la série nous arrive chez Kana dans la collection Big, avec une traduction de Sophie Lucas, dans une édition en grand format à 12€70 le volume. Si j’aurais personnellement préféré un format classique moins onéreux, il faut reconnaitre que le travail d’édition est propre, mettant bien en valeur la qualité esthétique du titre (vous trouverez d’ailleurs un extrait via CE LIEN pour vous en convaincre).

Quoi qu’il en soit, de quoi est-il question dans ce manga ?

La tranquillité d’une petite ville japonaise, recouverte de neige, est brutalement perturbée par un meurtre odieux. Le corps démembré d’une lycéenne du nom de Mako Igarashi, est retrouvé près d’un lac. Bientôt, Mizuki Aikawa, élève au même lycée que la victime, revendique les faits auprès des forces de police locales. Cependant, alors qu’elle relate les événements, le doute s’invite progressivement dans la tête de ses avocats. Quels lourds secrets Mako et Mizuki partageaient-elle ?

Le résumé éditeur capte très bien ce dont il est question dans ce premier volume. Nous suivons la jeune Mizuki Aikawa, qui s’est rendue à la police suite au meurtre de sa camarade et seule amie Mako Igarashi. De ce postulat découle un récit d’enquête où l’avocat commis d’office de la jeune fille va tenter de démêler le vrai du faux, constatant des éléments étranges dans le récit de sa cliente, étant persuadé qu’elle cache des choses.

adabanaD’emblée, la mangaka nous fait comprendre qu’on est face à un récit dur et cru. Car au-delà du meurtre que l’on voit en partie dès les premières pages, il va être question de sujets très tendus, notamment le viol et le harcèlement, qui seront évoqués frontalement. Précisons d’ailleurs que la mangaka aura le bon goût de vraiment mettre en scène, avec une certaine finesse, la question du traumatisme lié à une agression sexuelle. Il me semblait important de préciser ceci, car si il est indiqué que le manga est pour public averti sur la jaquette, il vaut peut-être mieux savoir quels sont les sujets abordés, d’autant plus qu’on sent que ce sera central par la suite (et la tentative de viol survenant dès le second chapitre, ce n’est pas une grosse révélation).

Ceci étant dit, qu’est-ce qui rend ce premier tome intéressant au-delà des sujets abordés ? Selon moi, cela vient d’une part d’un vrai talent dans l’écriture, faisant de ce thriller un page turner, terme souvent utilisé pour qualifier la littérature policière, et pour cause, le fait d’être face à un mystère à résoudre fait qu’on avance dans le récit sans s’en rendre compte, à l’affut de nouveaux indices. Sur ce point, c’est particulièrement efficace et les pages défilent à toute vitesse. Presque trop vite même, car on referme ce premier volume avec quelques pistes, mais énormément de questions, qui font que la suite du récit sera cruciale concernant l’appréciation globale qu’on pourra en faire.

Car les thrillers qui démarrent bien et se prennent les pieds dans le tapis d’une résolution décevante ne manquent pas… Je garde encore un souvenir douloureux de la seconde moitié du Bateau de Thésée pour ma part. Mais on peut espérer ici que la faible durée de la série jouera en sa faveur, afin de nous proposer un récit court mais maitrisé de bout en bout. À juger sur pièce par la suite.

L’autre gros point fort du titre, qui est aussi indispensable que la qualité d’écriture selon moi dans un récit du genre, vient de l’ambiance que la mangaka arrive à poser. Si elle propose une référence visuelle à Twin Peaks au détour d’une case, c’est plus du côté du travail d’ambiance que de l’écriture que cette référence peut se ressentir. De même, l’aspect urbain et hivernal du titre évoque tout un imaginaire de thriller, qui s’accommode très bien du temps froid et de la neige. Personnellement, j’ai l’impression que ce trope fréquent du genre est là pour créer un contraste entre la beauté de la neige qui tombe et le froid que l’on ressent dans cette saison. Et surtout, cela permet de transmettre de vraies sensations lors de la lecture, qui en devient plus immersive.

Cependant, il reste une petite réserve me concernant. Elle sera à lever ou non dans les tomes suivants, puisque cela dépendra grandement du développement du récit et des personnages. Sans trop en dire, un personnage masculin aura visiblement une importance capitale dans l’affaire, et ce personnage m’a semblé particulièrement caricatural dans la façon dont il est ici écrit. Et compte tenu de son importance potentielle, cela pourrait poser problème ou non en fonction de ce que la mangaka en fait. À voir donc par la suite, mais je préférais relever cette petite crainte.

Du reste, c’est vraiment une entrée en matière particulièrement efficace pour peu qu’on adhère au genre (ce qui est mon cas, vous l’aurez compris). Si on ne peut pas crier à l’originalité folle, le tout est fait avec talent et intelligence, et si ce n’est le personnage qui m’a fait tiquer, tout le reste est vraiment à la hauteur. Mais, comme je l’ai déjà dit, une histoire de ce genre se juge sur sa globalité. Ici, on est en droit d’être confiant, tout en gardant donc la réserve de mise.

20 commentaires

  1. J’ai exactement les mêmes craintes et en même temps bon a priori que toi depuis que j’ai lu l’extrait, mais j’avoue que par contrainte des fameux pieds dans le tapis (et le prix un peu élevé) je préfère attendre pour voir si l’ensemble vaut le coup.
    En attendant j’ai trouvé l’ambiance classique mais saisissante avec une héroïne très efficace dans son rôle de victime – bourreau.

    Aimé par 1 personne

    • Je peux comprendre pour le prix, comme je l’ai dit, j’aurais préféré un tarif plus bas et un format poche de mon côté.

      Mais comme je n’ai pas eu à le payer, je ne peux rien dire (si ce n’est que je ne payerai pas 13 euros pour ça, je trouve ça trop cher).

      Aimé par 1 personne

      • Ah ben ça, le prix des mangas (et des produits culturels en général), c’est un truc important pour moi.

        Je suis clair sur ce point, à mes yeux les mangas coûtent beaucoup trop cher et c’est déjà un frein réel pour moi qui suis passionné (je ne te dis pas les séries que je suis en train d’arrêter et de revendre, et la diminution drastique de mon budget achats), alors pour un public plus large c’est encore pire.
        C’est d’ailleurs à mon sens une des raisons qui font que, comme pour le jeu vidéo, cela reste un loisir de « spécialiste », là où le cinéma et la musique ont des canaux de diffusions à tous les prix (même gratuits ou presque) qui font que ce sont vraiment des moyens d’expression universels.

        Aimé par 1 personne

      • Belle réflexion. J’avoue que je n’avais jamais fait le lien, mais c’est vrai, que les gens connaissent plus universellement des chansons ou des films que des livres et ce malgré les bibliothèques/médiathèques qui permettent d’en trouver quasi gratuitement.
        Pour ma part, j’ai la chance d’avoir un bon salaire et pas la contrainte d’une famille à faire vivre derrière, donc j’en profite un max, mais je sais bien que c’est loin d’être le cas pour tous. Du coup, je suis heureuse aussi de partager avec ceux qui n’ont pas les moyens de s’en payer et de prêter mes livres, mais c’est bien limité comme action…

        Et en poussant la réflexion ailleurs, je serais curieuse de savoir comment Noeve a pu finaliser sa collection à moins de 4€…

        Aimé par 1 personne

      • J’ai cru comprendre pour Noeve qu’ils ont rogné à mort sur leur marge et sur celle des libraires. À mon avis le but est surtout de poser la marque Noeve comme ça, plus que dégager de gros bénéfices sur cette collection. Après, n’étant pas dans le secret des Dieux, je ne saurais pas en dire plus.

        Aimé par 1 personne

      • Je crois (à vérifier) que c’est des choses qui peuvent se faire au cas par cas. De toute façon je pense que les éditeurs disposent de moyens de pression sur les libraires vu que c’est eux qui leurs fournissent leur gagne pain. Ce qui n’est pas forcément une bonne chose, mais bon.

        Aimé par 1 personne

      • Il faudrait demander vraiment en détails à un libraire sur ce point.
        Je précise que la question du pourcentage plus bas, c’est quelque chose que j’ai entendu qui aurait été corroboré par l’éditeur mais on me l’as pas dit directement, donc peut être à prendre avec des pincettes.

        Aimé par 1 personne

  2. Yo, ton article ma motivé à le lire plus vite que prévue, et je viens maintenant que c’est fait.
    J’ai été également agréablement surpris par Adabana, même si je le trouve également assez chère pour ce que c’est, mais le fait de l’avoir sur un grand format permet de bien retranscrire la beauté de certaines cases.
    On sera fixé assez vite, mais 3 tomes me semble plutôt correct pour le développement de l’histoire.
    La lecture est de plus en plus captivante et chaque chapitres apportent de nouveaux éléments qui donne une nouvelle perspective sur la vérité de cette histoire.
    C’est un grand OUI pour le moment

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.