Mon avis sur… Vinland Saga T.12 à 14 de Makoto Yukimura

Vinland Saga

J’ai déjà expliqué dans mes précédents articles que Vinland Saga était un manga vraiment excellent. Et je me disais que la deuxième partie de l’histoire (qui commence avec le tome 9) avait un fort potentiel et me plaisait encore plus que le prologue, déjà brillant. Ce que je ne savais pas, c’est que les tomes 12 à 14 qui clôturent cette deuxième partie sont en réalité incroyables, et font clairement passer la série à un tout autre niveau ! Voyons donc ensemble (en évitant les spoils trop majeurs) en quoi ces trois volumes sont magistraux et proposent une évolution menée d’une main de maître de l’intrigue, mais surtout, de Thorfinn.

Esclave à la ferme de Ketil, au Danemark, Thorfinn n’a plus grand-chose à voir avec le mercenaire qui arpentait les champs de bataille dans l’espoir de venger son père en tuant le cynique Askeladd. Au contact des habitants de la ferme, qu’ils soient libres ou esclaves, Thorfinn découvre une nouvelle vie loin des combats, faite de dur labeur, de sueur et de terre. Toujours hanté par ses crimes passés, il fait le serment de renoncer à la violence. Mais lorsqu’un esclave en fuite arrive dans le domaine de Ketil avec à sa poursuite le Serpent et ses hommes, il devra décider s’il n’y a pas des situations qui méritent que les hommes d’honneur se battent.

Lorsque j’avais parlé des tomes 9 à 11, j’avais éludé le fameux esclave en fuite évoqué dans le résumé ci-dessus, et pour cause, il ne s’agissait que d’un élément mineur au sein de l’intrigue. Cependant, il finit par avoir dans les tomes 12 et 13 une importance capitale, en ce sens où il va être le catalyseur de changements majeurs chez Thorfinn et Einar, son seul ami qu’il considère comme son frère.

En effet, l’esclave en question n’est autre que Gardar, le mari disparu d’Arneis, l’esclave favorite de maître Ketil. Ce même maître Ketil qui par ailleurs prépare une guerre perdue d’avance contre le roi Knut. Nous suivons ainsi en parallèle l’histoire de Knut et de Thorfinn qui finissent par se rejoindre dans la violence. L’occasion pour Ketil de perdre tout ce qu’il a, de voir Le Serpent, le chef de ses mercenaires se révéler (j’espère qu’il reviendra plus tard dans le récit), et de comprendre encore une fois l’absurdité de la guerre, thématique centrale du manga depuis le début.

Et c’est ici que tout le talent de l’auteur se révèle. Les deux intrigues mettent l’accent sur cette idée de façon particulièrement brillante. La partie concernant Gardar et Arneis montre notamment en quoi la soif de pouvoir et la guerre ont fait perdre au couple tout ce qu’ils avaient. Tout ceci se finissant dans la douleur et convaincant Thorfinn et Einar que les choses ne peuvent pas continuer ainsi. Nos héros avaient déjà tout perdu, et avaient conscience que la guerre ne pouvait amener que la mort, l’esclavage et le malheur. Et ce nouveau choc les convainc finalement de chercher la paix ailleurs, afin que plus jamais ils n’aient à se battre. C’est ainsi que le Vinland est évoqué et deviens l’objectif qu’ils souhaitent atteindre. Un objectif qui ressemble presque à un rêve, mais qu’on a vraiment envie de voir se réaliser.

Et le premier pas vers cet objectif est de mettre fin à la bataille entre Ketil et Knut, qui a déjà fait un grand nombre de victimes. Ceci est l’occasion pour Thorfinn de mettre sa volonté à l’épreuve, et de montrer qu’il refuse désormais d’en arriver au « dernier recours » (la violence). Ceci donne lieu à un moment absolument formidable, où notre héros endurera la violence de son adversaire sans jamais riposter. Une séquence hautement symbolique qui rappelle l’adage « tendre la deuxième joue », qui s’achève avec notre héros toujours debout, expliquant aux hommes face à lui qu’il n’a pas d’ennemi.

Thorfinn

Et le tout se conclut par un face à face avec Knut qui permet de voir le parallèle qu’il y a entre les deux, qui aspirent à la paix même si les moyens mis en oeuvre sont opposés. Une écriture toujours aussi intelligente permet d’éviter une forme de manichéisme ou de facilité dans le développement des deux, pour finir de me conquérir, à la fois du fait de l’intelligence de l’écriture et de la portée émotionnelle de tout ceci. Le tout, bien évidemment, porté par une esthétique toujours formidable proposant de véritables moments de grâce visuels. 

De plus, Makoto Yukimura a le bon goût de ne laisser aucun personnage sur la touche, et arrive même à apporter une conclusion magnifique au développement d’un personnage qui jusque là était assez agaçant (ce qui était voulu), à savoir le second fils de Ketil, Olmar. Au cours de cet arc, le personnage qui souhaitait être un guerrier comme son frère a montré toute l’étendu de sa bêtise et de sa lâcheté, et a finalement trouvé le courage de dire qu’il ne voulait plus de la guerre et était prêt à tout abandonner pour ça. Et il finit par devenir l’administrateur des terres de son père, et décide de les travailler avec les hommes encore en vie, afin de la faire prospérer de nouveau. Un développement et une conclusion brillante pour un personnage selon moi marquant de par son écriture exemplaire et bouleversante !

Olmar

Et c’est ainsi que se conclut cette deuxième partie de Vinland Saga, qui m’aura totalement bouleversé. Sur ses six tomes, les trois premiers sont excellents et posent le nouveau cadre qui permet à Thorfinn et Knut de connaitre une nouvelle évolution brillamment menée, qui culmine dans les trois tomes suivants qui sont absolument formidables à tous points de vue. Que ce soit dans l’intelligence de l’écriture et du développement d’absolument tous les personnages, dans l’esthétique toujours aussi puissante ou dans le message fort porté, la série passe ici un cap en terme de qualité, et devient à mes yeux un véritable joyau à lire à tout prix ! Ces trois tomes parfaits à tout point de vue vont me marquer durablement.

14 commentaires

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.