Mon avis sur… Sounds of Life T1&2 de Amu

Sounds of Life

Mine de rien, le calendrier joue quand même pas mal sur l’humeur et sur la perception des choses. Passer d’une année à l’autre donne le sentiment d’un recommencement, de remettre les choses à plat, et c’est notamment le cas pour les sorties manga. On reprend à zéro, et les éditeurs lancent les hostilités pour une nouvelle année, donnant le ton pour 2023 ici. Et dans le domaine, Akata sort d’emblée l’artillerie lourde si l’on peut s’exprimer ainsi, avec leur première nouveauté très attendue, Sounds of Life, dont les deux premiers tomes sont sortis conjointement le 5 janvier. J’ai tenté l’aventure, aidé par une forme d’effervescence sur les réseaux, et grand bien m’en a pris, car on a d’ores et déjà une des séries importantes qui ponctueront cette année 2023.

Une série sur le long cours qui fête ses 10 ans au Japon

Avant d’entrer plus en détails sur pourquoi ces deux premiers tomes m’ont totalement emballé, il convient de revenir un peu sur la série en elle-même. Premier et pour le moment unique manga de Amu, pseudonyme de Sakura Amyû, mangaka passionnée de koto, instrument qu’elle pratique depuis qu’elle a trois ans et qui est au cœur de Sounds of Life. Un sujet qui habite l’autrice donc, et qui explique le fait que le manga est ultra investi émotionnellement (une de ses grosses qualités, on le verra). La série est prépubliée au Japon dans le Jump SQ de Shueisha depuis 2012, à un rythme mensuel, qui explique son impressionnante tomaison actuelle (28 volumes reliés). Akata édite aujourd’hui la série, ayant fait le choix judicieux de sortir conjointement les deux premiers tomes, et prévoyant un rythme de sortie soutenu puisque les prochains tomes arriveront mensuellement (pendant combien de temps, je l’ignore). Enfin, la série dispose d’une très solide traduction de Aline Kukor.

Je reviens sur le fait que le titre est la première série de son autrice, car je trouve toujours passionnant de voir les débuts d’artistes, leurs hésitations et leurs difficultés, et voir le potentiel d’amélioration. Or, ici, il est difficile de croire que c’est un premier essai, tant le titre est déjà extrêmement maitrisé sur tous ses aspects, que ce soit son esthétique somptueuse et précise, ou l’écriture particulièrement carrée tout en laissant la place aux émotions. Et surtout, il y a un côté touchant à voir la mangaka s’enthousiasmer de l’arrivée de son titre en France, en même temps qu’elle s’inquiète de la réception d’un travail qui date d’il y a 10 ans. 

Mais sur ce point, elle peut donc être rassurée, cette entrée en matière est donc de très haut niveau, comme nous allons le voir. Et en parlant de voir, vous pouvez vous-même vous faire un avis sur le très beau premier chapitre, disponible via CE LIEN. Quoi qu’il en soit, la série semblait très attendue chez nous, notamment car elle est précédée ici d’une adaptation animée qui a contribué à susciter de grosses attentes.

Mon avis sur ces deux premiers tomes

Depuis la rentrée et le départ de ses aînées pour l’université, Takezô est devenu le seul membre du club de kôto. Passionné par cet instrument, il refuse de laisser le club disparaître faute de nouvelles recrues. Mais sa salle est déjà envahie de délinquants, et aucun de ses camarades ne semble s’intéresser à une activité musicale aussi traditionnelle… jusqu’au jour où Chika, un élève à la mauvaise réputation, demande à s’inscrire.

Sounds of Life est donc une série school life tournant autour d’un club de koto, un instrument de musique traditionnel japonais dont j’ai découvert l’existence en lisant ce titre. Le cœur du titre est, comme on s’y attendait, de développer l’aspect musical en même temps que les personnages qui peuplent le titre, véritables vecteurs d’identification et d’émotions pour le lectorat. Dès le premier chapitre, on partage le point de vue de Takezo, le président du club de koto, mais le vrai cœur émotionnel et centre de ce début de récit est clairement le personnage de Chika, celui qui a sur cette introduction la caractérisation la plus dense.

ChikaOn l’apprend dès le premier chapitre, Chika était un voyou, chassé de la maison familiale, qui a vécu avec son grand-père, ancien luthier spécialiste du koto, aujourd’hui décédé, et qui souhaite donc s’inscrire au club afin de partager la passion de son papy. Un personnage comme je l’ai dit très chargé d’un point de vue émotionnel, quand bien même il y a un côté archétypal chez lui (présent également chez les autres), mais qui fonctionne parfaitement, simplement car il est bien écrit et vraiment habité. Pour le dire simplement, on sent que la mangaka aime son personnage et y croit totalement, et c’est le cas pour tous les personnages présentés dans ces premiers tomes, même si elle donne surtout de la voix à Chika et à Satowa Hozuki, jeune fille brillante qui pratique le koto depuis sa plus tendre enfance.

Des interactions entre ces deux personnages, présentés comme les principaux de l’histoire, découle toute la richesse et la profondeur de ces deux premiers tomes. Ayant chacun un caractère bien trempé, leurs interactions alternent entre l’humour et l’émotion avec une grande aisance, et surtout, une intelligence au service de l’écriture et de leur développement. Deux personnages porteurs d’énormément de promesses donc, d’autant plus sur une série qui va se dérouler sur la durée. Mais au-delà de ces deux portraits déjà saisissants et suscitant l’empathie sans peine, la mangaka arrive à trouver un enjeu simple mais très efficace pour lancer ce récit et donner envie de le suivre. Bien entendu, on ne peut pas vraiment voir où tout cela va aller avec seulement ses deux premiers tomes, mais la précision globale de l’écriture, la gestion des personnages et des enjeux et les différentes pistes déjà mises en place rendent confiant quant à la suite de la série.

Chika et Hozuki

D’autant plus que tout ceci est soutenu par un dessin de grande qualité, où le découpage cherche à la fois à capter la profondeur des sentiments de chacun, et la force de la musique. Si je recommande volontiers de s’écouter quelques morceaux de koto (notamment celui-ci) pour se représenter plus facilement comment sonne l’instrument, l’autrice sait mettre en scène l’impact de la musique sur les personnages, afin de nous mettre au diapason de leurs émotions. Et, plus simplement, le dessin est d’une grande efficacité, que ce soit dans des character designs inspirés qui donnent de la personnalité à chaque protagoniste, ou dans son découpage qui met en valeur les regards, les gestes ou tout autre élément qui en dit beaucoup sur chacun.

Ainsi, ces deux premiers tomes particulièrement habités émotionnellement font d’emblée mouche, faisant de ce début de série un très gros coup de cœur pour ma part, donnant le la de cette nouvelle année de manga. Une promesse de qualité, qui donne d’ores et déjà envie de suivre ces très beaux personnages durant les nombreux tomes qui nous attendent. On aura l’occasion d’en reparler, mais on est très clairement sur une trouvaille de choix pour Akata, et sur la découverte d’un talent qui était déjà très mur il y a 10 ans. Une très belle surprise.


Et parce que c’est rare qu’on soit d’accord, ce qui rend la chose d’autant plus signifiante, je vous mets ci-dessus le thread du camarade Koda sur ces deux premiers tomes, qui me rejoint dans le coup de cœur, et qui parle très justement du fait que les personnages aient une « marge de développement folle », compte tenu de la durée de la série, et du fait qu’ils soient déjà vraiment chargés (pour le meilleur), en terme d’écriture.

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28 commentaires

  1. Entre le thread de Koda et ton article j’ai vraiment envie de me lancer mais franchement déjà 28 tomes et toujours en cours c’est flippant… Je ne sais pas quoi faire 😥 sûrement attendre de voir si la qualité se maintient…

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  2. Koda et toi qui êtes d’accord ? Sortez le champagne
    Déjà un point que j’aimerais souligner (même si c’est déjà le cas depuis quelques année maintenant) c’est l’audace qu’on de plus en plus les éditeurs à sortir des séries avec beaucoup de tome déjà dispo au Japon. C’est toujours une prise de risque (encore plus quand c’est un manga de musique comme ici). Ça fait plaisir de découvrir des séries aux fortes qualités tout en arrivant à se renouveler sur le très long terme.
    Sinon pour parler de la série, n’ayant pas encore eu le temps de lire les tomes (mais déjà vue l’animé) je te suis sur l’apprentissage des personnages. Que ce sois l’apprentissage du Koto (qui est un instrument inconnu en occident) ou même celui de la vie pour nos personnages, on s’engage sur une très belle aventure.

    Aimé par 2 personnes

    • Ça me rassure ce que tu me dis là, même si au vu de cette entrée en matière, je me doutais que l’autrice aurait des choses à dire et des idées pour étoffer ses personnages !

      Pour ce qui est de sortir des séries qui ont déjà de la bouteille, c’est clair que c’est une chance, même si au final ça ne change peut être pas grand chose niveau politique éditoriale, sauf en cas de plantage, ou tu te retrouves avec ça sur les bras 😅

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  3. J’ai aussi enfin lu mes deux tomes et j’ai aussi beaucoup aimé !
    Je trouve le dessin de l’autrice très beau , on sent qu’elle vient du monde du shojo.
    Je n’ai pas encore senti le souffle de la passion pour le koto mais en revanche j’ai versé ma petite larme sur Chika et sa relation avec son grand-père.
    J’aime beaucoup le côté grande gueule d’Hozuki et lui, ainsi que leur relation chien-chat, car cela promet une belle évolution. Le côté groupe de potes me plaît aussi assez et me rappelle la dynamique de bien des titres sportifs.
    C’est une très belle pioche de la part d’Akata.

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  4. Clairement Chika c’est le personnage que tu ne peux pas détester. Et je le reconnais, durant ses premières apparitions (et parce qu’il est roux sur la couverture) il m’a fait songer à Kyo de Fruits Basket. Ils partagent le même archétype du « faux délinquant », qui se relève être un adolescent qui ne sait pas s’exprimer, a le sang chaud, mais veut bien faire. Juste il ne sait pas comment s’y prendre.

    Je sens que l’autrice va nous surprendre avec ses personnages en se basant sur des archétypes pour mieux amener les personnages à s’en extirper. Satowa m’a déjà bien surprise : on la voit d’abord comme une simple fille aisée et hautaine, et elle se relève en fait maladroite en dehors du koto et piégée par le poids que lui confère la réputation de sa famille. Et Tetsuki est mon petit favori dans les personnages secondaires. Il manquerait plus que des petits QR codes à scanner pour avoir la musique au moment de la lecture pour que ce soit parfait.

    Aimé par 1 personne

    • Pas bête l’idée de QR code ! Mais au moins, tu peux avoir sur Twitter des petits threads de la traductrice qui met certains morceaux en lien. Je sais que perso, j’en ai écouté pour au moins me représenter les sonorités qu’on est sensé entendre durant la lecture.

      Aimé par 1 personne

      • Oh très belle initiative de la traductrice ! Le QR Code me vient souvent en tête depuis que j’ai vu un roman l’utiliser pour insérer de la musique justement.

        Aimé par 1 personne

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