Avec ce troisième tome de Beast Complex, Paru Itagaki conclut, surement provisoirement, l’œuvre qui l’a fait connaitre. Conclusion provisoire, car si c’est en effet à l’heure actuelle le dernier fragment de cet univers, l’autrice prévient dans son petit mot d’introduction qu’elle compte y revenir de temps à autre, au gré de nouvelles histoires courtes. Le signe qu’elle a réussi à fonder un univers aux possibilités narratives infinies, plein de vies qui ne demandent qu’à être explorées et racontées. Retour sur ce dernier fragment, qui se savoure comme il se doit, tant son importance symbolique est grande, tout comme sa qualité.
Un grand merci à Ki-oon pour l’envoi de ce tome.
Mon avis sur les tomes précédents : Tome 1 – Tome 2 –
Comme les deux premiers tomes de cette série dérivée, on est encore une fois face à des histoires courtes développant toujours une petite intrigue autonome, autour de deux personnages opposés qui se rencontrent. De ces confrontations ressortent des situations fertiles, propices aux morales ou simplement aux belles histoires fugaces. Des histoires légèrement plus courtes, puisqu’à nombre de page sensiblement équivalent, ce troisième tome contient 7 histoires contre 6 dans chacun des deux premiers. Ce qui ne change pas grand chose en soi.
Sans revenir en détails sur chaque histoires, on peut déjà préciser que deux se focalisent sur des personnages présents dans Beastars, une revenant sur un couple inter-espèce qui a été aperçu dans le tome 14 de mémoire, et l’autre centré sur Legoshi et Sagwan, étoffant la question de la vie maritime et de la distinction entre monde terrestre et aquatique, élément assez peu abordé dans la série principale, qui mériterait encore d’être davantage exploré. On pourrait même imaginer une série courte exclusivement focalisée sur cet aspect, tant il est fertile… Chose qui peut être élargie finalement à énormément d’aspects de l’univers Beastars, tant il dispose de potentialités à explorer.
Mais en plus de ces histoires, les autres proposent encore une fois des variations passionnantes sur des thématiques déjà abordées par la mangaka, par le biais d’autres personnages, dans des situations différentes, tantôt cocasses, tantôt portées vers quelque chose d’émotionnel ou de dramatique, mais toujours avec cette portée métaphorique et discursive vis-à-vis de notre réalité.
Je retiens notamment l’histoire où une tigresse working girl qui doit prendre sur elle au travail arrive à relâcher ses tensions quand elle est massée par une alpaga. Une tension sexuelle s’instaure entre les deux femmes qui est très intéressante, mettant en valeur la position de la tigresse dans sa vie quotidienne, où elle doit faire semblant. Si la question de l’homosexualité est implicite (voire relève de la pure interprétation de ma part ?), celle de la position d’une femme dans le milieu de travail est particulièrement explicite et intéressante. Et la chute de cette histoire, très belle, pourrait clairement laisser le champ libre à une intrigue plus longue.
Et les autres histoires sont toutes à l’avenant, que ce soit celle qui évoque le harcèlement scolaire et la souffrance du harceleur, qui n’est pas en mesure de comprendre qui il est, la dernière qui capture parfaitement l’incapacité de se comprendre pour deux personnes issues de classes sociales opposées, ou encore, celle plus percutante encore où un acteur et un actrice mettent en exergue l’hypocrisie du milieu du spectacle, qui met ses déviances sous le tapis pour conserver son image de glamour. Chaque histoire est profonde bien que courte, pose d’emblée ses personnages et ses intrigues, les rendant puissantes et émouvantes. Et en définitive, ces histoires courtes sont une nouvelle démonstration du talent infini de Paru Itagaki, dont l’écriture est toujours d’une virtuosité folle, servie par un talent de mise en scène toujours aussi insolent.
Maintenant, il est temps de nous sortir les autres titres de cette mangaka, car on ne peut pas s’arrêter à Beastars, précisément car cette série est absolument marquante, et le signe d’un talent qui doit continuer à s’exprimer. Merci d’avance.
Très bel appel à découvrir la suite de l’oeuvre de la dame que je partage totalement. Avec une telle conteuse et observatrice, ce serait dommage de s’arrêter là !
J’aimeAimé par 2 personnes
Je ne peux pas imaginer que Ki-oon ne poursuive pas personnellement.
J’aimeAimé par 2 personnes
Moi non plus, sauf si un éditeur pas sympa leur grillait la priorité
J’aimeAimé par 1 personne
Ce serait pas très cool ma foi.
J’aimeAimé par 1 personne
Et on sait que tous les éditeurs sont cools 😉
J’aimeAimé par 1 personne
C’est amusant que tu approfondisses justement la seule histoire que j’ai moins aimée xD
J’ai adoré ce tome, j’espère vraiment que ça ne sera pas le dernier. Et je suis totalement d’accord avec toi, le monde marin mériterait sa série dérivée à lui seul ! C’est très riche et la façon dont le deuil est géré vraiment intéressante.
J’aimeAimé par 1 personne
Je dois t’avouer que cette histoire ne m’a pas forcément plus marqué que les autres, dans le sens où je les trouve vraiment toutes excellentes, mais durant l’écriture, c’est celle qui qui m’est naturellement venue. Alors que je pensais au départ parler plus de celle sur les deux acteurs.
Le hasard ma foi !
Mais oui, il y a tellement de pistes à explorer, et le monde marin me semble une particulièrement intéressante. Surtout que, que ce soit dans cette histoire ou dans la série principale, j’ai vraiment l’impression que ça titille l’autrice.
J’aimeAimé par 1 personne
Imaginez qu’après le massage, l’alpaga révèle à la tigresse son désir secret de se faire dominer et que cela donne à la tigresse l’envie de faire des recherches sur le BDSM… Ça pourrait déboucher sur des scènes aussi tendues qu’intenses.
J’aimeJ’aime