La boxe est une discipline sportive pour laquelle j’ai un regard particulier. Si ce n’est pas la seule pratique de combat, elle me semble être une des plus brutales, et surtout, une de celles qui charrie un imaginaire particulier. Cela est d’autant plus vrai qu’elle entretient un rapport singulier avec la fiction, notamment au cinéma, où les films de boxe sont légion et me fascinent depuis fort longtemps, alors même que la violence de ce sport fait que j’en ai une certaine aversion. Mais dans le cadre de la fiction, cela donne quelque chose de fertile, de Rocky à The Fighter en passant par La Rage au Ventre, les films de boxe m’ont toujours donné le sentiment de parler avant tout de la vie. Avec Black-Box, Tsutomu Takahashi semble partager cette vision du sport comme vecteur d’un travail sur des personnages meurtris par la vie.
Un grand merci à Pika pour l’envoi de ce volume. Vous trouverez un extrait d’une cinquantaine de pages sur le site de l’éditeur via CE LIEN.
Pour commencer, resituons la série. Black-Box est un manga prépublié dans le magazine mensuel Afternoon de Kodansha à partir de 2015, terminé en six volumes au Japon. Une série écrite par un Tsutomu Takahashi qui avait donc déjà plus de 20 ans de métier derrière lui, et plus d’une dizaine de séries à son actif, et proposant un point de vue adulte sur le sport. Chez nous, la série est publiée par Pika et traduite par Julien Favereau, et l’éditeur a annoncé la sortir au rythme d’un volume tous les trois mois.
Dès les premières pages, l’auteur met l’accent sur son personnage principal, le jeune Ryoga Ishida, qui devient boxeur professionnel alors qu’il souffre de l’image que renvoie sa famille. En effet, son père est en prison pour meurtre et son frère a été arrêté pour la même raison. De plus, Ryoga était présent sur les lieux du crime de son frère, ce qui fait peser quelques soupçons sur lui. En résulte l’image du dernier membre d’une « famille de tueurs » qui lui colle à la peau.
Mais ce lourd héritage ne l’empêche pas de conserver un contact avec son père, qui le coache par courrier afin que Ryoga reprenne le flambeau et devienne à son tour un grand champion. Ce premier point est d’emblée un des plus importants mis en avant, l’auteur travaillant beaucoup cette relation dans ce premier volume, qu’on imagine être au cœur de la série. Ce qui est certain, c’est que cela contribue à créer une ambiance tendue et assez sombre, proche de ce qu’on voit dans beaucoup de films de boxe ou des drames humains sont les moteurs des personnages sur le ring.
Ici, on constate que Ryoga est très à cheval sur le palmarès professionnel de son père, et qu’il se voit comme une continuité de celui-ci. Mais surtout, cela fait du jeune homme une figure mortifère, puisqu’on arrête pas de nous dire que sur le ring, on joue sa vie, et que chaque boxeur est prêt à tuer l’autre. Un rapport extrême à ce sport qui est mis en valeur par l’histoire personnelle du protagoniste, issu d’une « famille de tueurs ».
Et le trait de l’auteur épouse cette ambiance mortifère à la perfection, comme c’était déjà le cas dans Sidooh (le seul autre titre du mangaka que je connais). En jouant beaucoup sur les noirs, il crée une ambiance très tendue, retranscrivant parfaitement le côté dur de ce milieu. Et son travail très singulier sur les visages permet de donner beaucoup de caractère aux différents personnages, y compris le boxeur qui sera rapidement envoyé au tapis dans ce premier tome.
Mais surtout, il travaille de façon intelligente quoique classique la mise en scène de la boxe et de tout ce qui entoure la pratique. Les cadres sur le ring renvoient directement à des plans de cinéma auxquels on est habitué dans le genre, et la façon de mettre la focale sur les mouvements des jambes et des bras rend les passes claires et impactantes, rendant le tout particulièrement efficace.
Pour fini, il convient de noter que ce premier volume se lit vraiment très vite. Jouant sur les silences et sur le visuel davantage que sur les dialogues, l’auteur confère un rythme déjà enlevé à ce tome, très encourageant pour ce qui est de la série dans sa globalité. Sa faible durée (6 tomes) ne devrait pas poser problème si le mangaka reste dans un même souci d’efficacité et cadre son récit comme il se doit. Quoi qu’il en soit, ce premier volume est déjà percutant, aussi bien sur le ring qu’en dehors, et Takahashi semble avoir parfaitement tiré les leçons des œuvres qui l’ont précédé.
Et puisque j’ai parlé plusieurs fois de films de boxe, je vous recommande très chaudement le film The Fighter de David O. Russell, surement mon film préféré de ce cinéaste que j’aime tout particulièrement. Je mets en lien la bande-annonce que je trouve très réussie. Et plus globalement, je recommande tous ses films surtout ceux qu’il a fait depuis The Fighter, toujours centré sur les petites gens (et les familles dysfonctionnelles), toujours avec des acteurs à leur meilleur, et toujours mis en scène avec une virtuosité assez folle.
Étant en pleine découverte d’Ashita no Joe sur le même thème, je pense me laisser tenter. J’adore la sensation de vitesse et puissance de l’extrait que tu as mis !
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Oui, le bougre sait y faire pour représenter le combat, mais pas que en réalité. Si tu lis l’extrait éditeur, tu verras qu’il y a aussi vraiment quelque chose dans sa façon de dessiner la ville et les environnements. Ca m’a beaucoup rappelé les films de boxe, un « genre » que j’aime beaucoup (alors que j’ai une aversion pour la discipline en tant que sport, trop violent).
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Je suis convaincue de son talent graphique depuis que j’ai découvert NeuN, Sidooh l’a confirmé et je suis confiante pour celui-ci vu ce que tu en dis.
COMME toi, dans la vie je ne suis pas du tout boxe, mais en manga ça claque tellement bien et bien surtout ça raconte autre chose.
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Je ne suis en temps normal pas très boxe (bien que ça fasse toujours sourire de voir des gens foutre des coups de poing dans la figure des politiciens).
Le style graphique de la planche que tu as mise en avant est très sympa, et je remarque que l’auteur à déjà plusieurs de ses titres sortie en France. En plus la couverture du tome à un aspect très année 80
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J’ai aussi beaucoup aimé ce premier tome de Black box! Je trouve que la boxe est un sport qui donne généralement de bonnes œuvres que ce soit en BD ou au cinéma. Si tu aimes ce que fait l’auteur je ne peux que te conseiller Bakuon Retto, Détonations ou Soul Keeper! 🙂
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