C’est très compliqué pour moi qui ne suis pas forcément familier avec ce domaine de mettre des mots sur une expérience purement esthétique. Bien souvent, quand j’aborde les mangas, j’en parle surtout en terme de narration, de sens et d’interprétation. Or, au fil de ma lecture de ce tome 2 de And, je me suis rendu compte que la proposition de Mari Okazaki était d’une grande puissance esthétique à mes yeux, et que c’est par ce biais qu’elle a réussi à me transporter. On va donc essayer de voir de quoi il en retourne ensemble.
Un grand merci à Kana pour l’envoi de ce second volume
Mon avis sur le Tome 1
J’avais déjà beaucoup apprécié le premier tome de And, qui proposait une ambiance qui fonctionnait parfaitement, et des personnages blessés auxquels je m’attachais facilement. Il y aurait éventuellement à redire sur la figure facile du triangle amoureux qui se dessine, ou sur la sempiternelle virginité du personnage féminin à plus de 25 ans, mais ces éléments passent finalement plutôt bien tant le récit a de qualités dès son amorce.
Cependant, si l’esthétique du premier volume m’avait déjà beaucoup plu et contribuait à l’ambiance, c’est vraiment avec ce deuxième tome que quelque chose m’a frappé d’un point de vue visuel. C’est assez compliqué à décrire, mais au fil de ma lecture, je me suis aperçu que Mari Okazaki multiplie les cases au sein d’une même page, créant une surcharge visuelle volontaire. Mais surtout, elle profite de ceci pour proposer de nombreuses variations en terme de cadrage, beaucoup de gros plans et quelques audaces formelles qui contribuent à instaurer une ambiance spécifique en phase avec les situations et l’évolution des sentiments des personnages.
Et loin de proposer ce genre de planche à quelques reprises seulement, c’est un procédé qu’elle applique à l’ensemble du volume, y compris dans des doubles pages où une grande image est rehaussée par des vignettes incrustées. Le tout en conservant à souci de lisibilité qui fait plaisir à voir, renforçant l’impact de la lecture. Ma camarade Tachan en parle bien mieux que moi sur son blog, d’autant plus qu’elle connait très bien la mangaka. Elle parle d’un aspect liquide du visuel, et je la rejoins totalement sur ce point, et j’aime particulièrement cette phrase que je me permet de citer : « La science du découpage de l’autrice fait virevolter les dessins sur les pages, les faisant danser au rythme des sentiments inavoués des personnages. »
Je ne trouvais pas les mots, mais c’est totalement ça ! On a le sentiment d’une chorégraphie des corps et des sentiments particulièrement travaillée, que ce soit dans des séquences de discussion ou dans des moments plus importants. Car ce second volume fait pas mal avancer les choses, et les audaces formelles se chargent de renforcer l’impact de certaines séquences. J’apprécie tout particulièrement l’importance accordée aux gestes des mains grâce aux gros plans et aux nombreuses cases qui s’enchaînent.
Et à la métaphore aquatique de Tachan, on peut ajouter celle du tourbillon des sentiments, dans lequel est prise Kaoru, qui est parfaitement représenté dans les visuels. C’en est tellement virtuose qu’on pourrait presque passer à côté du souci du détail et de la complexité visuelle et narrative qui est à l’oeuvre ici.
Ainsi, il y a réellement une alchimie rare ente le fond et la forme sur ce second tome qui m’a totalement soufflé. Si j’avais déjà beaucoup apprécié le premier, l’expérience de lecture a été décuplée. Et même quelques réserves en terme d’écriture (pourquoi faut il absolument que Kaoru soit vierge ?) ne viennent pas entacher le tableau. Une lecture d’une très grande force, par une mangaka qui semble au sommet de son art. Je suis absolument ravi et subjugué !
D’abord je suis tellement heureuse de voir que cette autrice parvient à te toucher ainsi. Graphiquement Mari Okazaki est peut-être l’une des autrices qui me touche le plus. Et ta chronique lui rend honneur.
Merci pour la citation. Je suis ravie d’avoir su trouver les mots pour toi.
Au passage, je me dis que son autre titre (que je vénère) Complément Affectif pourrait peut-être encore plus te plaire avec ses personnages plus installés dans la vie mais avec les mêmes compo sublimes, à nouveau très végétales et aquatiques.
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Pour le coup, je crois que quand j’ai fait des recherches sur ses mangas trouvables à un prix décent, Complement Affectif n’en faisait pas partie 😅
Il faudrait que je regarde si c’est dispo en numérique. Mais en effet, ça pourrait me plaire.
Et de rien pour ce qui est de te citer, tu m’as bien aidé parce que c’est compliqué pour moi de mettre des mots sur des questions de mise en scène et de graphisme dans le manga.
Quoi qu’il en soit, je suis effectivement séduit par le style de la mangaka !
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Zut, mais je me doutais qu’ils ne seraient pas simples à trouver ^^!
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👍🏾
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