Mon avis sur… Freaks café T.1 de Meika Arisaki

Freaks Café

J’attendais pas mal la sortie de Freaks café, une des nouveautés de la rentrée (ou presque) chez Akata, un des éditeurs que je suis assidûment. Je ne connais pas du tout Meika Arisaki, ici, c’est simplement le pitch de base de la série (qui est en cours au Japon avec cinq tomes parus) qui m’a tout de suite intéressé. Voyez plutôt :

Bienvenue au café Statice, un établissement unique en son genre ! Car quelque soit votre paraphilie, Hiro Sen’ichi, son gérant, écoutera vos confessions sans jamais vous juger. Il se peut même qu’au détour de la conversation, il vous serve une infusion sur mesure, rien que pour vous… Mais Hiro, derrière les apparences, quels sont les secrets qu’il cache ?

Il convient de préciser que le terme paraphilie désigne les pratiques sexuelles dites « déviantes », c’est à dire qui ne s’inscrivent pas dans ce qu’on qualifie de norme. La jaquette en dévoilant une par exemple : l’attirance pour les femmes enceintes. Mais on peut ranger le BDSM dans la liste des paraphilies, tout comme je suppose beaucoup d’autres pratiques.

Ainsi, bien que n’ayant pas (il me semble) de tendances qui sortent de la norme, la thématique de la sexualité en général m’intéresse, tout comme celui des comportements que l’on catégorise ou étiquette. De ce fait, un manga qui se présente sous la forme de chapitres (quatre dans ce premier tome) qui décrivent à chaque fois une pratique sexuelle particulière et comment la personne concernée vit avec avait de quoi m’intéresser fort.

Mais je dois d’emblée faire une précision, car le manga est allé dès le second chapitre dans une direction à laquelle je ne m’attendais pas. Alors que je pensais qu’il allait s’agit de quelque chose de « positif », prônant la tolérance et le respect des pratiques de chacun, il est très rapidement allé vers un côté thriller, où les pratiques sexuelles amènent à des choses extrêmes. Je ne vais pas en dévoiler davantage, mais je tiens quand même à le préciser car cela a déjoué mes attentes, et a surtout beaucoup chamboulé la façon dont j’ai pu interpréter l’oeuvre, qui est beaucoup plus ambiguë que ce à quoi je m’attendais.

En effet, sur les 4 chapitres que comporte ce premier tome, seul le premier se conclut sur une acceptation épanouie de la paraphilie du personnage. Pour les trois autres, les pratiques sexuelles des personnes concernées ont toujours quelque chose qui est au minimum extrêmement malsain. Il ne s’agit pas ici d’un jugement personnel sur ces pratiques, mais bel et bien d’un constat sur les conséquences réelles de celles-ci. Encore que le problème ne vienne pas des pratiques en tant que telles, mais des personnes qui ont ces pratiques, qui présentent toutes des troubles évidents. Ainsi, cela crée un revirement idéologique selon moi. Car si le personnage principal fait de son mieux pour aider les gens et leur faire vivre de façon épanouie leur paraphilie (chose positive, mettant en valeur la tolérance), les conséquences en sont finalement négatives. Cela crée le risque d’assimiler les tendances sexuelles à quelque chose de réellement négatif alors que ça ne devrait pas l’être. Certes, on comprends bien que les personnes concernées ont des soucis d’ordre psychologique, et que ce n’est donc pas leurs préférences sexuelles qui sont en cause, mais le fait d’avoir un tel déséquilibre dans les cas (comme je l’ai dit, une histoire qui se conclut de façon positive sur les quatre) me semble problématique.

C’est pour cela que je trouve le manga et son propos assez ambigus. Mais cette ambiguïté n’empêche pas une vraie qualité, aussi bien dans l’esthétique que dans l’écriture, qui permettent de poser des ambiances vraiment réussies. De plus, même s’il y a un fort côté sériel dans la narration, un fil conducteur apparaît déjà dans ce premier tome, venant renforcer le côté thriller de l’histoire (mais je vous laisserai découvrir de quoi il en retourne). Ainsi, le manga se lit d’une traite avec un grand plaisir, le tout relevé par un travail éditorial de qualité, auquel Akata nous a habitués. Dernier point concernant le travail esthétique, il est important de signaler compte tenu du sujet que la mangaka est restée relativement soft d’un point de vue visuel. Il n’y a aucune nudité dans ce premier tome, et surtout, elle trouve un bon équilibre entre suggestion et représentation, nous amenant à voir quelques éléments des pratiques, sans aller trop loin. De ce point de vue, c’est une réussite incontestable à mes yeux, d’autant plus que c’était assez casse-gueule.

En résumé, le plaisir de la lecture et l’ambiguité thématique font que je n’hésiterai pas à recommander Freaks café, et surtout à continuer la série afin de voir comment évolue le traitement de la thématique (sachant que le tome 2 arrive chez nous le 02 octobre. En effet, j’ai été totalement pris au dépourvu sur ce point, ce qui n’est pas un mal en soi. De plus, c’est cette thématique forte et le point de vue très marqué avec lequel elle est traitée qui font, selon moi, que c’est une lecture riche et fertile, mais qui risque de ne pas parler à tout le monde.

Freaks Café

18 commentaires

  1. J’étais déjà partagée à l’annonce, entre la curiosité vis-à-vis de ces déviances que je ne connais pas et la crainte que ce soit trop pour moi, justement. Le fait que ce ne soit pas toujours traité avec bienveillance et ouverture d’esprit mais plus comme prétexte pour parler de gens déviants (peu importe leur sexualité) me dérange. Je passe donc mon tour.
    Merci de m’avoir permis de faire le tri ^^

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    • De rien, et je comprends tout à fait.
      À vrai dire, j’avais hésité à parler de cette façon du manga, de peur de trop en révéler, mais je me suis justement dit que l’ambiguïté du positionnement pouvait être source de mauvaise surprise, du coup j’ai préféré parler clairement de la façon dont le sujet est traité.

      Donc si tu pense que ce n’est pas fait pour toi et que mon article t’évite une lecture qui ne te convient pas, j’en suis ravi. Dans tous les cas, je continuerai la série donc tu aura l’occasion de voir si je nuance cet avis ou pas.

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      • Tu as bien fait d’en parler. J’aime qu’on soit honnête comme ça dans ses ressentis de lectures et qu’on ose dire ce que parfois les autres (éditeurs ou lecteurs) nous cachent.
        Effectivement, je lirai la suite de tes avis dessus si tu continues, on ne sait jamais

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