Cela faisait un moment que je voulais me lancer dans Blue Giant de Shinichi Ishizuka, série terminée au Japon en 10 tomes et toujours en cours chez Glénat en France. Ce n’est pas lié à une passion pour le jazz qui est un genre que je connais assez peu, mais c’est surtout la très bonne réputation du manga, ses couvertures magnifiques et l’idée de découvrir une histoire de passion brûlante pour un art en particulier qui m’attirait beaucoup. Et après avoir été encouragé sur twitter par plusieurs personnes, je me suis enfin lancé. C’est donc avec grand plaisir que je vais vous parler de ce premier tome plein de promesses.
Dai Miyamoto est en terminale. Il fait partie de l’équipe de basket, travaille à mi-temps dans une station service, et vit seul avec son père et sa petite sœur. Surtout, il s’est pris de passion pour le jazz depuis le collège. À tel point qu’il joue tous les jours sur les berges de la rivière, peu importe les conditions météo. Qu’il pleuve, qu’il vente ou que la canicule soit au rendez-vous, il joue. Il veut être un géant du jazz et reste persuadé qu’il peut y arriver. Seulement, pour cela, il va devoir se confronter à la réalité : entre les explications aux amis, les premières représentations chaotiques et les rencontres diverses, la détermination de Dai va être mise à rude épreuve…
Avant de s’attarder sur ce que raconte ce premier tome, je vais tout d’abord aborder l’aspect visuel du titre car il est vraiment magnifique. L’auteur a un coup de crayon impeccable qui fait de chaque page un régal pour les yeux, en plus de poser une ambiance avec un talent fou. On se croirait aux côtés de Dai lorsqu’il joue sur la berge la nuit, ou lorsqu’il est sur scène dans un bar. Ceci est d’ailleurs un des enjeux principaux du manga, réussir à retranscrire l’intensité de la passion et de la musique uniquement en images (même si pour le lire, je me suis mis une playlist de jazz qui aide à se mettre dans l’ambiance, je suppose d’ailleurs que beaucoup de lecteurs et lectrices ont fait de même). De ce point de vue, on constate un gros travail sur les décor et sur l’intensité du noir et blanc qui permet vraiment de s’immerger. En plus de ça, le mangaka met beaucoup l’emphase sur ce que ressent Dai lorsqu’il joue (et on le voit beaucoup jouer) avec de nombreux gros plans, n’hésitant pas à s’attarder sur les expressions de son visage, sa transpiration, mais également sur son instrument, afin de rendre compte de la puissance du son qui en sort. De ce point de vue, le contrat est parfaitement rempli dès ce premier tome et on n’a aucune peine à ressentir l’investissement du jeune homme.
Ceci étant dit, nous pouvons nous intéresser à l’écriture et au déroulement de ce premier tome. J’ai été particulièrement surpris par le rythme frénétique que l’auteur lui a conféré. Il se passe énormément de chose, de nombreux personnages gravitant autour de Dai sont présentés et chaque séquence est plutôt courte. Je me demande d’ailleurs si ce n’est pas une volonté de se rapprocher du rythme du jazz, avec ses nombreuses notes et son improvisation permanente. Toujours est-il que ce travail rythmique fonctionne parfaitement et que la lecture du tome passe à une vitesse folle, ce qui est toujours une qualité appréciable. Ainsi, on passe du premier chapitre où l’on assiste au moment de la naissance de la passion de Dai pour le jazz à sa première représentation en fin de tome, après de nombreuses heures passées à répéter seul au fil des jours. Tout ceci étant ponctué de moments de vie où l’on apprendra à connaitre son meilleur ami, son patron, sa famille ainsi que ses camarades de classe. Sans parler de l’homme qui va lui permettre d’avoir sa première opportunité sur scène, les gens avec qui il va jouer et quelques autres personnages plus ou moins anecdotiques. Je vous avais bien dit que ce premier tome était très rythmé et donc très riche.
Et au centre de toutes ces qualités, il y a ce personnage principal, Dai Miyamoto. Il séduit d’emblée car sa passion peut parler à toute personne ayant une passion. Qu’importe qu’ici il dédie sa vie au jazz, l’auteur arrive à donner à son récit une vraie forme d’universalité en parlant de passion au sens large. C’était selon moi le point qui devait être le plus important pour permettre l’adhésion des lecteurs et lectrices : il fallait dépasser le simple cadre du jazz pour que l’on puisse ressentir ce que ressent Dai. Et sur ce point, c’est parfaitement réussi. Je pense que chaque personne qui a vue naître en elle une passion a ressenti les mêmes choses : tout d’abord une première connexion qu’on n’arrive pas à expliquer. Ensuite, ne pas pouvoir communiquer aux autres ce que l’on ressent tant c’est fort, et surtout ne pas se soucier réellement de l’image que les autres ont de notre passion. Car on fera remarquer à plusieurs reprises à Dai que le jazz est soit ringard, soit un genre pour les snobs, mais il ne se sent pas concerné et ne se pose pas ce genre de questions : le jazz, il le vit un point c’est tout. De ce point de vue, ça me parle beaucoup ayant toujours eu du mal à faire comprendre mes passions aux autres, d’autant plus que parmi mes principales passions, certaines souffrent d’un manque de légitimité auprès de certains (le jeu vidéo en tête, mais le manga aussi dans une moindre mesure). De ce fait, je ne pouvais pas m’empêcher de ressentir de l’empathie pour Dai et ce qu’il vit.
Avant de conclure, je souhaite évoquer la toute fin du tome. Cela pourrait donc constituer un spoiler pour ceux qui ne l’auraient pas lu, même si je rappelle qu’on n’est que dans le premier volume ici. Mais je préfère prévenir au cas-où. De ce fait, pour éviter toute révélation, vous pouvez passer au paragraphe de conclusion.
J’ai trouvé l’idée de conclure le tome sur les témoignages de personnages ayant entendu Dai jouer très bien vue car elle permet déjà d’appréhender la suite avec une certaine sérénité, puisqu’il semblerait qu’il finisse par atteindre son objectif au vu de ce qui est dit. De plus, savoir ce qu’ont pensé les gens qui l’ont entendu jouer au fil de ce premier tome permet de revoir les événements sous un autre angle, en particulier concernant sa prestation dans le bar. En effet, ce passage semble être un premier échec pour Dai, mais on se rend finalement compte que les membres du groupe ont été divisés par sa prestation et qu’un d’entre eux a décidé de quitter le groupe tant il a senti quelque chose chez le jeune homme. Une conclusion de tome vraiment brillante à mes yeux qui donne envie de voir ce qui se passe pour qu’on en arrive à ce moment où l’on recherche des témoignages sur la vie et la carrière du jeune musicien.
En résumé, j’en espérais beaucoup de ce premier tome de Blue Giant et il ne m’a déçu en aucun cas. Je sais que ce n’est pas forcément la meilleure façon d’appréhender une oeuvre que de se faire une idée de ce qu’on souhaite y trouver car on risque d’être déçu, mais je n’ai pas réussi à m’en empêcher pour ce manga. Par chance, j’y ai trouvé exactement ce à quoi je m’attendais, c’est à dire une oeuvre qui dépasse son cadre de base pour atteindre une vraie universalité dans son sujet, qui est la passion qui nous anime. Je ne vois de ce fait pas d’autre mot pour qualifier ce premier tome que : passionnant !
Les japonais me bluffent totalement dans la diversité des titres qu’ils sont capables de proposer. Un manga sur le jazz…
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Moi aussi, je suis impressionné et ravi par toutes les thématiques que brassent les mangas. Le revers de la médaille est qu’il y a une infinité de séries qui me font envie de ce fait.
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Oui cela donne envie de beaucoup de titres. Et encore nous n’avons qu’une infime partie de traduit !
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